Homélie du 1er dimanche de Carême

par le Père André Benoit

Le dimanche 1 mars 2009
Samedi - 17 H 00 - Maubeuge Douzies
Dimanche - 9 H 30 - Bersillies
Dimanche - 11 H 00 - Maubeuge Saint Pierre Saint Paul
 
 
Jésus venait d’être baptisé. Aussitôt l’Esprit le pousse au désert... Chaque année, le premier dimanche de Carême nous emmène au désert, là où Jésus s’est retiré pour quarante jours de silence, de jeûne et de prière ; mais aussi quarante jours de lutte et d’affrontements. Dans le désert, il resta quarante jours, tenté par Satan...
 
L’Évangile de Marc que nous avons entendu ce matin, ne nous dit rien, ni de Satan ni des tentations. Luc et Matthieu développent beaucoup plus cette scène dans leur évangile. Le nom Satan peut se traduire par le mot : adversaire. Et en grec, diabolos, le diable, c’est celui qui divise, celui qui utilise le mensonge et la calomnie.
 
L’arme que Satan, l’adversaire, le diviseur utilise contre Jésus est tout a fait surprenante. Satan utilise la Bible, la Parole de Dieu. Et cette Parole, il la détourne, il la déforme. Écoutez la voix du tentateur telle qu’elle retentit dans l’Évangile de Matthieu : Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre...
 
Il est frappant d’entendre comment Satan détourne la Parole de Dieu, pour diviser, pour tromper, pour détruire. Il est frappant de constater que même la Parole de Vie et de Vérité peut être utilisée comme arme de mensonge.
 
L’Évangile de Marc ne donne pas de visage à Satan. Mais Satan a-t-il un visage ? Ou bien ce visage n’est-il pas celui du mal, celui de tous ceux qui à travers les siècles divisent, trompent et détruisent.
 
Chacun de nous doit lutter contre le mal, contre toutes ces tentations qui traversent le monde. Pour cela, il nous faut d’abord reconnaître le tentateur. Le danger qui nous guette est de nous laisser séduire, enfermer dans des idées qui mènent au repliement sur soi-même, au mal et à la mort sous toutes sortes de formes.
 
Chacun de nous doit Résister et Lutter contre le mal. Résister, c’est reconnaître ce qui me menace, ce qui me pervertit. Résister, c’est ne pas me laisser endormir par l’illusion que le monde est trop compliqué pour je puisse agir, que je n’y peux rien et que tout cela me dépasse. Résister, c’est m’emparer, nous emparer tous des Armes de l’Esprit.
 
Satan n’a pas de visages mais les visages qui trompent ne manquent pas sur cette terre. L’un de ces visages m’a particulièrement marqué dernièrement, c’est celui de cet évêque intégriste devenu en quelques heures tristement célèbre : Mgr Williamson. Il appartient à cette mouvance qui nie l’existence de l’extermination des Juifs durant la seconde guerre mondiale. Il prétend que personne n’est mort dans les chambres à gaz. Et face à l’indignation de tant de gens, Mgr Williamson cherche encoreà tromper à faisant croire qu’après tout, on est sûr de rien, que les historiens débattent encore de ces questions.
 
Qu’est-ce qui explique ce mensonge, cette manipulation ? Mgr Williamson appartient à ce courant antisémite qui tient les Juifs pour responsables de tous les malheurs du monde, pour responsable de la mort de Jésus. Ce rejet des Juifs est ancien, il existe de puis des siècles. Tous les antisémites de l’histoire n’ont pas voulu la mort des Juifs, mais leurs croyances, leurs idéologies ont conduit au pire, ont conduit à Auschwitz et à l’extermination de six millions d’hommes, de femmes et d’enfants.
 
L’attitude de Mgr Williamson et des négationnistes est d’une extrême gravité. Ma conviction est qu’elle ne relève du simple débat d’idée comme ils veulent nous le faire croire ; mais qu’elle poursuit avec d’autre moyens le projet des Nazis qui était d’anéantir le peuple juif, de rayer de la surface de la terre jusqu’à son souvenir.
 
En niant aujourd’hui l’extermination, c’est la mémoire même du peuple juif qu’on cherche à faire disparaître. Et faire disparaître la mémoire de ce peuple, c’est chercher à l’anéantir d’une autre façon.
 
Après la terrible épreuve de la seconde guerre mondiale, de nombreuses voix ont retenti dans l’Église dont celles de ses papes. On pense à Jean XXIII et à Jean Paul II qui déposa entre les pierres du mur du Temple à Jérusalem une prière portant ces mots : Dieu de nos pères, tu as choisi Abraham et sa descendance pour que ton Nom soit apporté aux peuples : nous sommes profondément attristés par le comportement de ceux qui, au cours de l'histoire, les ont fait souffrir, eux qui sont tes fils, et, en te demandant pardon, nous voulons nous engager à vivre une fraternité authentique avec le peuple de l'alliance.
 
Ces mots de Jean Paul II viennent du long travail de l’Église catholique sur ses rapports avec le monde, avec les autres confessions chrétiennes, avec les autres traditions religieuses, avec les incroyants. Le plus grand moment de ce long travail a été le Concile Vatican II entre 1959 et 1965. Pendant des siècles, une part de l’Église a considéré qu’elle possédait la Vérité et que cette vérité l’emportait sur la liberté et la conscience de chacun. Vatican II a affirmé les droits de la conscience humaine et la liberté de croire. Vatican II nous a invité à repenser notre conception de la vérité ; et comment l’Évangile, le message chrétien peut être aujourd’hui une Parole de Vie et de Vérité pour notre monde.
 
Le monde a changé. L’Église a changé. Et c’est en changeant, en se transformant que nous restons fidèles au Christ. Nous le savons bien, ce chemin-là n’est pas fini. Toujours, il nous faudra chercher comment être des chrétiens fidèles à l’Évangile, comment trouver les mots, les choix de vie et d’action qui parleront de Dieu et de l’Évangile au Monde. Cette recherche n’est pas réservée à quelques théologiens ou cardinaux, elle est l’affaire de tous, de toutes nos communautés chrétiennes répandues à travers le monde. Vivre et annoncer l’Évangile, c’est votre affaire à tous, notre affaire à tous, ici dans notre petite Église du val de Sambre.
 
Ma conviction personnelle est qu’aujourd’hui que groupes minoritaire de chrétiens sont opposés à ce que l’Église se transforme pour dialoguer avec le monde contemporain. Ces groupes sont en dehors de l’Église comme les disciples de Mgr Lefevbre et même à l’intérieur de l’Église catholique. Depuis fort longtemps, de tels groupes agissent et travaillent pour l’interprétation la plus restreinte possible de Vatican II voire le rejet de ce qui a été l’espérance immense d’une génération de chrétiens.
 
Nous laisserons faire cela, nous laisserons l’Église se replier sur elle-même, si nous baissons les bras, si nous n’y croyons plus, si nous renonçons à l’Évangile. Aujourd’hui face aux temps de crise que traverse notre monde et notre Église, chaque chrétien qui se lève, chaque chrétien qui résiste, chaque chrétien qui prie, chaque chrétien qui agit, chaque chrétien qui s’engage, chaque chrétien qui aime est un signe d’espérance pour le monde. Mes frères et mes soeurs qui êtes ici, ne laissez pas tomber le monde, il a tant besoin de vous. Ne laissez pas tomber le Christ, sa Parole est notre joie, sa Parole est notre espérance, sa Parole est notre vie.
 
En ce premier dimanche de Carême, la Parole de Dieu nous donne un signe : l’arc-en-ciel qui brille dans le ciel au dessus de l’arche de Noé. Voici le signe de l'alliance que j'établis entre moi et vous, et avec tous les êtres vivants qui sont autour de vous, pour toutes les générations à venir. Dieu fait alliance avec nous. L’histoire n’est pas finie. Notre chemin continue. Rappelle-toi, Seigneur, ta tendresse, ton amour qui est de toujours. Dirige-moi par ta vérité, enseigne-moi car tu es le Dieu qui me sauve.
 
Amen.
 
 
 
 

Article publié par Paroisse Sainte Aldegonde • Publié le Mardi 03 mars 2009 - 16h52 • 12174 visites

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